Comment sont nés les grands cocktails ? Qui a eu l’idée, dans quelles circonstances, d’associer alcools, jus ou autres fruits pour créer ces stars des terrasses et des comptoirs ? Je vous propose de partir à la découverte des histoires et légendes de quelques classiques de la mixologie.
Le Bellini
Un prosecco et de la purée de pêche, voici la recette simple mais absolument délicieuse du cocktail vénitien par excellence. C’est en effet à Venise, dans le mythique Harry’s Bar, que ce cocktail a vu le jour derrière le comptoir de son patron Giuseppe Cipriani.
Cipriani a donné à son bar, en 1931, le nom de Harry Pickering, un jeune étudiant américain arrivé à Venise dans les années 1920 pour soigner un début d’alcoolisme et abandonné à son sort dans la Sérénissime, à qui il avait prêté 10 000 lires pour lui permettre de rentrer chez lui, et qui lui avait en retour, revenu à Venise guéri de son alcoolisme, donné le triple afin qu’il ouvre son propre établissement.
C’est donc dans ce bar, en 1948, que Giuseppe Cipriani a créé, en mélangeant le célèbre vin effervescent italien à un nectar de pêches blanches, ce cocktail mythique baptisé d’après le peintre vénitien Giovanni Bellini, qui l’aurait inspiré avec un tableau composé d’aplats orangés.
Les photos de cet article ne représentent pas les cocktails mentionnés, mais des réalisations du cours « Les bases de la mixologie«
Le Spritz
Restons dans Venise, mais remontons au XIXe siècle, lors de l’invasion de la ville par l’Autriche, pour assister à la création du célèbre Spritz.
Là, dans les ruelles de la ville flottante, aux comptoirs des bars, les soldats autrichiens, grimaçant en descendant leurs verres de vin italien, demandent aux tenanciers de « spritzen », d’arroser, en bon français, le vin d’eau. Voici donc né l’ancêtre du Spritz qui inonde aujourd’hui les terrasses.
Avec l’apparition de l’eau gazeuse de Seltz au XXe siècle, puis l’ajout du prosecco, et enfin du Campari ou de l’Aperol, en fonction du barman ou de la barmaid, sans oublier la rondelle d’orange, le Spritz a fait du chemin en presque deux siècles.
Le Sex on the Beach
L’histoire de la plupart des cocktails est très incertaine, voir quasiment légendaire. Il est fort probable que celle du Sex on the Beach, qui n’était sans doute à l’origine même pas composée de grenadine mais bien de jus de cranberries, relève du mythe. Mais, je trouve que les légendes sont tout aussi fascinantes que l’histoire, et en font même partie intégrante. C’est pourquoi je prends toujours un malin plaisir à les conter.
Nous sommes en Floride, en 1987, en plein « Spring Break », ou congé de printemps américain. Cette année-là, la « National Distribution », une société de distribution d’alcool, lance son nouveau schnaps à la pêche, et désire donner un coup de pouce à ses ventes. Pour se faire, elle lance un concours et promet une belle récompense au bar qui vendrait le plus de schnaps.
Ted Pizio, barman du Confetti’s Bar, a alors l’idée d’incorporer la liqueur à de la vodka, du jus d’orange et de la grenadine. Pour donner un nom à son cocktail, Ted réfléchit aux deux motifs qui amènent les visiteurs en Floride : le Sex on the Beach est né. Les étudiants, retournés chez eux après les vacances, commandèrent alors la recette dans leurs bars locaux, exportant ainsi la création de Ted.
Le Bloody Mary
Autres légendes pour un cocktail mythique à l’origine plus qu’incertaine. Si le cocktail semble avoir été créé en 1921 au Harry’s New York Bar de Paris par le barman Fernant Petiot, à la demande de l’acteur Roy Barton, trois récits circulent au sujet de la provenance du nom du Bloody Mary, tous plus fascinants les uns que les autres.
Le premier évoque comme source du nom la célèbre Mary Tudor, « la Sanglante », cruelle reine d’Angleterre persécutrice, ou bien encore la Bloody Mary de la légende, mère infanticide s’en prenant aux enfants qui l’appellent par trois fois devant leurs miroirs à la nuit tombée.
La seconde possibilité serait que ce nom fasse référence à cette « bloody Mary », cette satanée Mary, c’est-à-dire l’épouse d’Ernest Hemingway, qui l’appelait ainsi car elle ne voulait pas le laisser boire. C’est pourquoi le fameux écrivain commandait un breuvage inodore à base de vodka et de jus de tomate, afin que sa Mary ne sache rien de ses pérégrination alcoolisées.
La dernier récit fait référence à la célèbre pirate Mary Read, qui résista seule, abandonnée par les hommes et accompagnée d’Anne Bonny, la seconde célèbre pirate de l’équipage de Jack Rackham, contre les troupes anglaises, et qui dévoilait un sein à ses victimes avant de les achever afin de leur prouver la valeur d’une femme au combat.
L’histoire des cocktails est donc pleine de somptueuses légendes dont j’adore me délecter. Je pourrais également vous parler de la collaboration d’un importateur de vodka et d’un producteur de ginger bear qui décidèrent de mélanger leurs produits afin d’écouler leurs surplus de stock et créèrent ainsi le Moscow Mule ; de l’invention du Gin-Tonic au XIXe siècle lorsque l’on se rendit compte que la quinine du tonic permettait de lutter contre la malaria, et qu’y ajouter une touche de gin adoucissait grandement cette boisson amère ; ou de la création du Old-Fashioned au Pendennis Club de Louisville, pour le propriétaire de la marque de Bourbon James E. Pepper, qui l’exporta en le demandant aux barmen au cours de ses voyages. Mais, je pense que vous avez votre compte de contes et légendes… au moins pour cette fois.
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