À Sidon, terre phénicienne se jetant dans la mer, fondée par Tsidone selon la Bible, petit-fils de Noé, et dont la pourpre est vantée par Homère, j’erre dans les rues dans une quête sucrée. Sortant du château de la Mer bâti par les croisés, je m’éloigne de la plage qui fut témoin du rapt d’Europe et m’engouffre dans les ruelles de Sagette. Quelques mètres plus loin, la vitrine d’une pâtisserie de plusieurs étages et une odeur de sucre et de miel signent l’accomplissement de ma quête. Il est dix-sept heures à peine passées, et j’ai bien besoin d’un café.
La pâtisserie, une institution au Liban
C’est en effet en matinée ou dans l’après-midi que les Libanais consomment généralement ces pâtisseries dont je suis si friand, accompagnées d’un thé, d’un café ou d’un simple verre d’eau. À la fin des repas, on consomme généralement des fruits, et on se rend dans les grandes pâtisseries qui parsèment les villes du pays aux montagnes enneigées, puisqu’il est rare de préparer ces douceurs à la maison. C’est dans l’une de ces pâtisseries que je viens d’entrer. Voyons quelques exemples de ce qui se trouve en vitrine.
Petits plaisirs feuilletés, les baklawas sont un grand classique de la pâtisserie proche et moyen-orientale. Préparés chez tous les anciens peuples perses et ottomans, cette pâtisserie traditionnelle est, au Liban, à base de pistaches concassées et de sirop de sucre, mais des variantes existent à base noix, de noisettes ou de miel, en fonction du pays d’origine.
La base de ces petits gâteaux est la pâte phyllo, qui tire son nom du mot grec qui signifie « feuille », pâte feuilletée très fine qui donne au baklawa ce croustillant si caractéristique. Pouvant trouver ses origines, selon les hypothèse, des pains des peuples turcs, de la pâtisserie romaine ou de la cuisine perse, les baklawas sont un incontournable des pauses gourmandes libanaises.
Certaines pâtisseries sont, au Liban, intimement liées à la religion. C’est par exemple le cas des hadefs, dérivés du baklawa traditionnel préparés avec des noix pendant le jeûne du ramadan.
À base de semoule : Le maamoul de Pâques
Poursuivons avec une autre pâtisserie liée à une fête religieuse, chrétienne cette fois. Le Maamoul est un petit gâteau de semoule fourré, traditionnellement préparé durant la semaine sainte afin d’être servi pour la fête de Pâques.
Cette photo ne représente pas des Maamouls
Ce gâteau est réalisé à l’aide de petits moules en bois aux formes uniques, utilisés une fois dans l’année pour cette pâtisserie. Ces moules prennent plusieurs formes en fonction de la farce du gâteau : rond et conique pour le maamoul aux noix, rond et aplati pour ceux farcis de dattes, et allongés pour la pistache. La fabrication consiste à envelopper la farce dans la pâte de semoule, qu’on place ensuite dans le moule adéquat. Puis, on tape d’un coup sec sur la table pour les démouler, avant de les passer au four.
Une variante du maamoul consiste à étaler la pâte comme une tarte, comme l’indique son nom, maamoul-madd (« madd » portant l’idée d’étalement). Les farces peuvent être les mêmes que pour le maamoul traditionnel, ou bien encore de la crème de lait.
Le karabige, un autre gâteau à base de semoule, et pouvant s’apparenter au maamoul, est quant à lui servi avec une crème blanche onctueuse appelée « natef », faite avec des blancs d’œufs, du sirop de sucre, et des racines de saponaire, une plante également appelée « herbe à savon » pour ses fortes propriétés émulsifiantes.
Le cousin du macaron : le marsabens
Le marsabens, dont le nom dérive du marzipan, ou massepain, cette pâte d’amande datant du Moyen Âge, se situe à la frontière entre cet ancêtre européen et notre macaron, à ceci près qu’il se réalise sans blanc d’œuf, ce qui lui confère sa texture croquante. Garni de pistaches et lié avec de l’eau de fleur d’oranger ou de rose, cette petite confiserie au goût subtil sera parfaite pour accompagner mon café.
Pendant que nous y sommes, une autre pâtisserie s’apparente au macaron, au moins par son nom : le maakaroun. Ce cousin du macaron, ayant pour ancêtre commun le maccarone, une pâte italienne, tire son goût du mahlab – épice provenant du noyau de cerise noire Sainte-Lucie – et de l’anis qui le composent.
À l’origine, cette pâtisserie se préparait pour la Sainte-Barbe, le 4 décembre, fête durant laquelle les enfants content de maison en maison le récit de sainte Barbe, et se voient offrir de la nourriture.
Je viens de trouver une pâtisserie pour accompagner mon café du jour. Mes pérégrinations sirupeuses au Levant s’achèvent donc ici. Je vous remercie de les avoir suivies et espère qu’elles vous auront intéressés et fait voyager.
N’oubliez pas que pour tout savoir sur la cuisine libanaise, vous pouvez retrouver les cours du chef Karim Haïdar sur Artesane.com, et consulter ses livres Cuisine libanaise d’hier et d’aujourd’hui et Saveurs libanaises, miroir de la diversité.
Cette image ne représente pas des maakarouns
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